Je me promenais avec Pascal...

PATRICIA / Je me promenais avec Pascal
Je me promenais avec Pascal par habitude, comme un rituel, le dimanche. La journée commençait par une rupture, un lever tardif, une toilette sommaire, des vêtements de la veille, un bref coup d'œil dans le miroir et je sortais laissant ma chambre en désordre. Le corps tout ébouriffé, j'avalai au plus vite un café croissant au comptoir du bistrot de mon quartier. Un petit groupe d'amateurs venait souvent improviser quelques notes de jazz aux sons des voix rauques encore avinées et des corps échoués ou chaloupés par la musique. C'était l'heure du brunch, l'entre nous. Il fallait attendre le début d'après-midi pour que les gens plus sages ou plus conventionnels sortent en famille avec enfants.Pascal et moi, étions des célibataires choisis, nous avions largement l'âge d'être parents. Le week-end, jours comme nuits nous appartenait. Dans le possible, nous limitions les obligations et les contraintes. Ce contrat nous permettait de retrouver une apparente authenticité dans nos choix. La moitié de ce temps intime nous était dédiée. A l'amitié me disait-il ! Ces derniers mois, nous nous étions offerts une mission ou plutôt une lubie, nous laisser guider par nos rêves. Pas ceux de nos nuits, non ! Ceux de nos imaginaires éveillés et assumés.Je me rappelle un jour, nous avions croisé une jolie jeune fille blonde aux cheveux tout bouclés, toute frêle, toute réservée. Une histoire s'est construite autour de cette fragilité affichée : elle rencontrait un clown, vieux et gracieux, émerveillé, il lui offrait une colombe, celle de la paix bien sûr. Ce fut la coloration du jour. La paix, la beauté l'amour…. La discussion s'envenima. Nous ne partagions pas toujours les même avis, c'est cela l'amitié me disait-il : tout se dire, s'engueuler ça créer des liens.Un autre jour, nous observions un couple fasciné par une fresque murale incarnant le diable entouré de corps nus dansants. Sorte de danse macabre, de sabbat érotique. Il ne semblait pas attiré par les mêmes motifs, leurs regards scrutaient les deux versants de la scène. Mon Dieu ! Le diable, le couple, la tentation de vrais sujets imbattables pour passer une bonne journée. Nous avons rient de nos désillusions récentes et passées, puis épuisés comme une conclusion, nous avons médités sur le temps perdu et sur les religions et autres formes d'esclavage.Nos dimanches s'effeuillaient poétiquement entre scénarii improbables et discussions colorées, enflammées.
 

 

 

 

KAMEL / Je me promenais avec Pascal

Une photo avec un café, un lit défait et le volet ouvert à moitié, puis, vue de l'intérieur vers l'extérieur.
Je sors de mon lit, ouvre mes volets.
Je vais ensuite sur ma sélection de vue extérieur, allant jusqu'au toit donc le ciel où il y a une forme de cheminée, élevée.
Par la suite, je me rends au café d'à côté.
Je me sers un café évidemment et prends même plaisir à le boire. Je savoure avec excellence, et prends mon temps limité, pour après, me rendre à mon travail comme d'habitude.
Bref, à côté de moi, une autre personne à l'intérieur.
Il s'agit de personnes qui vont fréquemment dans ce café et que j'ai l'habitude de voir. Tous les matins, ça se passe comme cela…
 
 
CATHERINE / C'était l'automne, ou peut-être l'hiver ?
Je ne savais plus vraiment quand le temps c'était arrêté de compter pour moi.
Je me promenais souvent seule depuis la mort de Pascal, mon frère ainé.
C'était l'année de ses 30 ans, nous venions de passer quelques jours ensemble à Capri, mon lieu de vie où j'exerçai comme journaliste dans le domaine de la culture.
Nous étions très proches tous les deux et avions la même passion.
Celle de la photographie des âmes, nous cultivions ensemble cette même magie, cette attirance presque magnétique pour les regards profonds qui en disent longs sur le vécu, l'être.
J'essayai en vain de comprendre sa disparition.
Je me souvenais du jour où j'appris sa mort, je portai ma robe fourreau en stretch noire, mon turban en lin blanc enroulé autour de ma chevelure épaisse, un cadeau que nous avions déniché ensemble sur le marché en bas de la rue, à deux pas de la maison. Un lieu où il aimait tant se rendre et choisir avec soins des citrons verts et frais au jus ensoleillé, il disait !
Les yeux rougis, le cœur lourd, j'essayais tant bien que mal de dissimuler ma peine en errant des heures dans les rues.
Alors, à défaut de toi, je retrouvais ton copain "Gégé" qui lui, arrivait à te faire vivre en évoquant chaque jour de vieux souvenirs.
Il se trouvait assis, face à l'entrée, au plus proche du comptoir de cette brasserie Parisienne ou vous aviez l'habitude de prendre votre café et de refaire le monde ....
 
 

SYLVIE / Je me promenais avec Pascal

Il vint me chercher à mon domicile. Je venais juste de sauter du lit. La chambre encore couverte d'obscurité.
Dans le café du coin de la rue, un charmant jeune homme brun dégustait le café expresso noir qu'il venait de commander. Nous choisissons une place au bar pour commander mon petit déjeuner, tartines et œufs brouillée trônaient maintenant sur notre table. Après être repus, nous sortîmes du café où une belle femme et sa fille pour sa première sortie en vélo roulaient sur le trottoir. Elle était blonde, les cheveux frisés, elle ne semblait pas avoir peur de la chute, que le visage de sa mère laissait paraitre.
Plus loin, un homme jouait du saxophone, cette mélodie harmonieuse vint traverser tous mon être. Il était habillé de de gris mais sa musique donnait des couleurs à la vie.
Sur le parvis de la cathédrale, une jolie brune jouait avec des colombes, qu'elle avait apprivoisées. Sa robe blanche surlignait la douceur de son visage et le plaisir qu'elle.
Elle avait comme une complicité avec les animaux qui étaient posé sur sa main.
Derrière elle un clown jouait avec une passante, présentant des tours de magie.
Les toits des maisons se reflétaient dans les flaques d'eau.
Nous aperçûmes de belles toitures chapeautées de cheminées, de l'époque où les maisons étaient des œuvres. Il faisait beau, le temps n'était pas couvert, mais une brise, nous obligeait à mettre manteau et veste. Pascal trouva l'atmosphère agréable, celui de l'été indien et c'est là, dans cette ruelle de Paris que je quittais pascal.
 
 COLETTE/ La femme chic au turban blanc et les deux femmes en miroir
La femme chic au turban erre à travers les ruelles ; sa vie s'étiole et elle n'a plus de force pour la retenir. Sa maladie est éprouvante et malgré tout son courage elle n'en est pas moins perturbée. Elle a tout essayé ou presque. Elle s'est confiée à des magnétiseurs de tous genres, des homéopathes ou phyto quelque chose, acupuncteurs et ostéopathes. Elle a ingéré pilules et ampoules, subi des lasers, de la radiothérapie, de la chimio et toutes sortes d'analyses ; elle s'est allongé souvent sur le divan des psys, elle a livré sa vie à des mains étrangères, elle a tenté, seule, d'affronter cette période si lourde, a refusé l'aide de ses proches, qui bien malgré elle, l'ont quand même entourée, et maintenant elle vient tenter de trouver de nouvelles solutions auprès de ces femmes.
L'une est indienne, semble-t-il et fait des travaux de couture, car ses dons de guérisseuse ne la nourrissent pas, l'autre est africaine, elles œuvrent toutes les deux chacune dans leur antre étroit, en miroir, l'une semblant complémentaire de l'autre. La femme indienne est plus jeune et son art réside surtout dans les massages ayurvédiques, palpations et doigtés, fermeté et sûreté.
L'autre, la maman africaine a plus d'une vingtaine de potions et tisanes, elle n'est pas chamane mais ses phrases ressemblent à une litanie intemporelle qu'elle annone inlassablement. Elle murmure des syllabes ou des mots en attendant que sa cliente réagisse.
Elle semble en transe et en même temps en osmose avec la femme qu'elle traite, sûre d'elle et de ses pouvoirs. La femme remet son turban après sa séance, hésite à frapper chez sa voisine, qu'elle a oublié de payer. D'ailleurs que donner à ces personnes qui semblent offrir leurs services sans attendre ni pièce ni billet. Mais pour la femme au turban si la santé n'a pas de prix, c'est un long chemin qu'elle n'a plus peur de traverser. Elle a la certitude que ces deux- là lui ont offerte plus que la guérison. Leurs âmes se sont ouvertes à elle et l'ont inondé de leurs forces.
 

 

 

 

 

 

  AMEL/ Hommage à l'écrivain

 
La main de l'écrivain prolonge
La mesure de son geste
La main explique
La profondeur du reste
La main disserte son silence
La main discerne les nuances
La main décerne l'espérance
Quand elle se ferme
Elle est violence
Elle devient poing
Sur l'interrogation de l'existence
Alors ne compte que sur toi
Et pour tous les doigts
Pour associer l'espoir
Aux plis des cris de l'ignorance
Ouvre ta main sur le savoir et la tolérance
 

 

CATHERINE / Je m'appelle Colombe

Depuis ma plus tendre enfance, j'affectionne et observe avec contemplation les oiseaux.
Les regarder voler, tournoyer, voltiger me procure un sentiment de joie et de plénitude immense.
Comme moi, ma grand-mère Hélène portait un regard bienveillant sur les volatiles.
Chaque matin, elle veillait tout particulièrement à laisser les portes de la grange entrouvertes afin que mesdames les hirondelles puissent en toute quiétude nicher leurs futures progénitures.
Je venais enfin de recevoir une réponse favorable à ma demande de formation.
Oui, j'allais intégrer l'école du "cirque des oiseaux".
J'allais pour la première fois rencontrer mon maitre de stage. Le privilège de le lui présenter mes deux amours ailés que j'avais baptisés "Gazette" et "Roucoulette" !
J'avais donc rendez-vous à treize heure avec Charlie, le clown, dans l'arrière cours d'une école à proximité d'une volière rouge et jaune remarquable tant par ses couleurs chatoyantes que par son envergure.
J'avançai lentement dans ma longue robe blanche, le pas léger, la gorge serrée, tenant fièrement, mes tourterelles qui comme à leur habitude s'accrochaient à mes indexes à l'aide de leurs ergots.
Il était là, souriant, son chapeau cloche et fleuri sur la tête comme un printemps.
Ses lèvres colorées entrouvertes chuchotaient la bienvenue à mes deux protégés.
J'étais comme hypnotisée par cet homme de petite taille, sa longue et fine main s'approcha avec courtoisie de mon poignet.
Lorsque celui-ci posa ses doigts délicatement sur ma peau, je fus étrangement envahie par un sentiment de calme intérieur. Une parfaite communion s'installa entre nous et perdura des siècles et des siècles ...