En ce matin du 13 mai, Maurin
avait parcouru le chemin de ronde sur les murailles de
Bazeilles. Vers l'Est, le soleil se levait à
travers une légère brume. Dans les
poulaillers et les basse-cours, les coqs chantaient.
Le garde était fatigué par sa longue et
ennuyeuse nuit de veille. Il pensait avec impatience
à la soupe bien chaude et au pain qu'il allait
manger dans la salle des gardes.
- Tout à coup il entendit
des hennissements vers la forêt, au Nord. Il
sortit brusquement de sa rêverie pour observer
les alentours. A l'orée du bois, il vit des
reflets et comprit instantanément que
c'était une troupe. Il courut jusqu'à la
cloche qu'il fit retentir de toutes ses forces.
-
- A la garde ! La ville est
attaquée ! hurla-t-il.
-
- Pendant ce temps, assis sur un
banc de pierre qui était le seul mobilier de la
prison, Jean le forgeron et Marie la blanchisseuse
étaient enfermés dans un cachot
souterrain, maladorant, sale et humide. Dans cette
pièce sans lumière vivaient des rats et
des cafards. Les murs étaient taillés
à même la roche.
- Personne n'y venait sauf le
gardien qui apportait un peu de nourriture. Ils
avaient très mauvaise mine.
- Un nommé Anthèlme
partageait leur geôle. Ce laboureur était
emprisonné pour avoir volé du
pain.
- Ce matin là, Jean et
Marie, assis au sol discutaient à voix basse
:
- - Je m'inquiète, Jean,
que va-t-il nous arriver ?
- - Peut-être serons-nous
jugé et fouettés en place publique ?
répondit-il.
- Marie était
inquiète et effrayée. A ce moment, le
couple entendit des bruits de pas et de serrures.
-
- La porte s'ouvrit en
grinçant et le duc de Bazeilles, l'air plus
cruel que jamais, entra, accompagné d'un garde
tenant une torche à la main.
- - Debout, les gueux !
ordonna-t-il d'une voix méprisante. Vous serez
jugés puis pendus dimanche prochain
après la messe ! Tu as voulu me tuer avec la
herse rouillée, mes blessures ne
guérissent pas...
- A ces mots, Marie sentit une
boule se nouer dans sa gorge et elle éclata en
sanglots.
- Jean,
désespéré, s'agenouilla pour
demander grâce au Seigneur.
-
- Soudain, un garde arriva en
courant dans les sous-sols de la haute tour où
se trouvaient les cachots. Il s'adressa, haletant ,au
maître des lieux :
- - Seigneur, une troupe ennemie
arrive au Nord !
- - Prévenez, tous mes
soldats, hurla Bazeilles, fermez les portes de la
ville et relevez le pont-levis !
- Le soldat s'en alla à
toute vitesse.
- Ensuite le Duc sortit de la
geôle et le gardien referma la porte .
- Jean se releva et s'approcha
des barreaux pour écouter ce qui se passait. Il
entendit le seigneur dire au garde .
- - Passe par le tunnel secret
qui débouche dans la forêt et va vite
quérir des renforts. Préviens le comte
Paulin de Mouzon que les Anglais nous
attaquent.
- Puis Pierre II le Cruel s'en
alla par l'escalier .
-
- Jean appela le garde et lui dit
:
- - Eh, toi ! Viens voir, tu veux
devenir riche, l'ami ? Il te suffit de porter cette
bague à Paulin de Mouzon, montre-lui et dis-lui
que je suis en prison, ici à Bazeilles.
- Il retira une bague en or
portant un sceau de son annulaire gauche et la passa
à travers les barreaux .
- - Si tu promets d'accomplir
cette mission, Paulin de Mouzon te couvrira
d'or.
- Les yeux du jeune garde
brillèrent de convoitise. Son mariage allait
être magnifique grâce à cette
récompense. La belle Guillemette sera
fière de lui et voudra enfin l'épouser.
Il partit en courant. Il n'avait rien à perdre.
-
- Il ne risquait rien,
Bazeilles lui
avait déjà confié la
mission d'alerter Paulin de Mouzon.
-
À
suivre
-
|
|